L’histoire de nos vignobles s’inscrit dans celle de sa proche région, notamment la pittoresque ville de Ste Foy la Grande qui est une bastide fortifiée, fondée 1255 par Alphonse de Poitiers frère du roi Saint Louis aux fins de défendre le royaume contre les anglais (Guerre de cent ans) mais également des fins spirituelles puisque donné aux moines de l’Abbaye de Conques en 1076 par le seigneur de Pineuilh Laco de Barta). Voie de circulation de circulation terrestre mais surtout fluviales par la Dordogne  (gabarres) la ville prospéra au cours des siècles ainsi que les villages qui y sont rattachés, notamment St Quentin de Caplong…

Si l’on retrouve des vestiges viticoles sur les sites gallo-romains de la région foyenne (visiter le remarquable site de MONCARET), on peut dire que le véritable essor viticole date du XIe siècle avec la réforme monacale dite grégorienne.

Longeant Dordogne, Garonne et estuaire de la Gironde, le développement de la culture de la vigne permet de valoriser des terres peu favorables aux autres cultures mais produisant des vins d’une rare qualité et acquièrent très rapidement une grande notoriété dans tout le royaume de France, mais également dans toute l’Europe.

La vigne contrairement aux autres cultures n’est pas autoconsommable totalement localement, mais génère une richesse nouvelle aux enjeux financiers considérables ayant pour capitale commerciale le port de Bordeaux, mais également le transport par la navigation sur la Dordogne et la Garonne.

Si dans les temps moyenâgeux, le commerce jouissait d’une assez grande liberté, la concurrence devint aussi féroce que les profits étaient grands pour le commerce des vins. Dès 1379 sous la coupe d’ÉDOUARD III, BORDEAUX faisant alliance avec Libourne, Castillon, Blaye et St Macaire (qui seront dénommées filleules de Bordeaux et établissant une sénéchaussée) empêchent la commercialisation des vins dits « étrangers » rattachés soit au royaume de France (Nouvelles Conquêtes, dont Ste Foy sera la capitale)  d’autres sénéchaussées anglaises (Haut Pays).

 

Dès 1453, la  Guyenne redevenant française, CHARLES VIII (après une brève abolition de 3 ans) confirmera les privilèges de la sénéchaussée bordelaise (certainement pour pérenniser la fidélité de la ville très anglophile) en limitant le droit de descente des vins des « étrangers » qu’après la Saint-André (30 novembre) au mépris de tous les droits anciens. À l’époque, le vin, obtenu par fermentation d’un mélange de jus de raisins noirs et de raisins blancs, était clair, d’où son nom de « claret » (perpétué aujourd’hui par le bordeaux-clairet), par opposition au vin noir (black wine) du haut-pays (vins de Cahors, de Gaillac, de Bergerac…), très concentré en tanins. Le « privilège bordelais » accordé aux producteurs locaux permettait de vendre en priorité les vins du cru, avant l’arrivée des vins du haut-pays, bloqués jusqu’à la Toussaint ou Noël. Ce privilège était très important à une époque où le vin se conservait mal. 

Hugh Johnson mentionne : « Selon toute vraisemblance, ces vins étaient souvent meilleurs et plus puissants que la plupart de ceux produits autour de Bordeaux. C’est pourquoi les Bordelais les jalousaient et s’efforçaient de vendre en priorité leur propre production ».

Au XVIe siècle et jusqu’à  la révolution française, les ports de Bordeaux et de Libourne au gré des arrêts pratiqueront un protectionnisme continue et pénalisant pour tous les vins en amont de leur port par des droits de péage, des mises en marché restrictives en décembre après la commercialisation de leur vin, mais plus grave en limitant la contenance des barriques à  200l et non à  225l qui sont l’usage, déclassant les vins qui ne pouvaient plus être vendus « A bon compte ».

 

Au-delà  de cette rivalité commerciale, les dernières décennies de la Guerre de Cent Ans et la période qui suit ruinent le pays foyen (épidémie, bande de soldats, pillards…).

Après le retour de la prospérité à  partir de 1470, le XVIe siècle sera  marqué par les Guerres de Religions, qui seront particulièrement violentes et meurtrières dans le pays foyen : 1561 les protestant chassent moines et prêtes du pays foyen et endommagent la plupart des églises (aucun office catholique jusqu’en 1622). Cette période voit émerger une bourgeoisie (souvent de marchands) qui investie dans des propriétés possédant également des vignobles.

La jurade de Sainte Foy édictait toutes les régles définissant la production des vins locaux, agréant sur dégustation par un marquage au fer rouge chaque barrique (« merchage »voir photo) s’assurant ainsi  des risques contrefaçons qualitatives, mais également que les meilleurs crus ne voient leur paternité usurpée par les ports de Bordeaux ou de Libourne.

En 1635 Louis XIII démantèle les murailles de Ste Foy la Grande et réinstaure officiellement le catholicisme comme religion prédominante notamment par l’intermédiaire de l’ordre des Cordeliers qui installe un couvent dans la partie nord-ouest de la ville. A La révocation de l’édit de Nantes en 1685 par Louis XIV rend définitive cette inversion d’influence religieuse dans le pays foyen. Dès 1635 jusqu’à  la révolution française, l’émigration protestante vers la Hollande, l’Allemagne, l’Angleterre, les Etats-Unis sera un fait majeur.

Malgré le protectionnisme portuaire libournais et bordelais, l’évolution de la maîtrise technique de la conservation et du vieillissement du vin et cette émigration permet d’internationaliser les ventes  de vin de la région générant une richesse propice à l’épanouissement de l’esprit du siècle des lumières à Ste Foy.

La révolution Française favorise l’accroissement de cette prospérité en faisant disparaître la rétention commerciale libournaise et bordelaise, mais la disparition des jurades induit dans le même temps une désorganisation des règles encadrant la production et la commercialisation des vins établies depuis plusieurs siècles.

 

De 1872 à  1876 le phylloxéra (originaire de l’est des Etats-Unis) attaque les vignobles foyen, la réponse sera apportée à ce fléau par la maîtrise laborieuse du greffage de nouvelles sélections variétales (cépages) sur des porte-greffes américains résistantes au parasite ayant pour but d’accroître les rendements et la qualité des vins produits

Cette période donne lieu à des recherches et des évolutions considérables des techniques viti-vinicoles. Le savoir-faire traditionnel s’enrichissant de nouvelles exigences de qualité, les outils et les techniques connaissent une mutation sans précédent. Une des plus importantes est l’accroissement des surfaces foliaires « poumon de la vigne » génératrice des sucres… La viticulture moderne est née, alors que dans le même temps  l’œnologie commence s’appuyer sur des bases scientifiques (Louis Pasteur).

 

La demande de plus  en plus marquées des acheteurs, notamment à partir du XVIIIe, à connaître et identifier la qualité des vins qu’ils achètent va conduire à  une nouvelle étape de la viticulture cette fois non pas technique mais administrative. Le début du XXe siècle verra l’avènement des Appellations d’Origine Contrôlée définissant strictement les zones viticole redéfinissant ce qu’avaient mis en place les jurades de l’ancien régime d’une façon républicaine.

 

La viticulture foyenne vielle de mille ans, a connu les caprices de l’histoire, des hommes et parfois de la nature. Le « Haut Pays » loin des zones d’influences politiques et commerciales oubliant le prestige de ses terroirs de l’époque où elle était anglais s’est doucement endormi. Rive gauche, rive droite, classement de 1855 ou de 1955, ce n’est pas temps la qualité des terroirs ou des vins qui étaient en jeu, mais un féroce jeu d’influence politique et économique.

En sachant la véritable histoire des vins de Bordeaux, la citation de l’Archiduc Otto d’Habsbourg-Lorraine,  » Celui qui ne sait pas d’où il vient ne peut savoir où il va car il ne sait pas où il est » s’applique on ne peut mieux à nos vins. Et au risque de paraître immodeste faire notre la devise de Mouton Rothschild (avant la révision de son classement)  »  Premier ne puis, second ne daigne,…» Sainte Foy suis…

 

 

 

Bibliographie:

  • Historien local : Jean Vircoulon (paysfoyen.canalblog.com)
  • SOCIETE D’HISTOIRE LES AMIS DE SAINTE-FOY ET DE SA RÉGION (saintefoylagrandehistoire.com)
  •  » Monographies Des Villes et Villages de France : Sainte Foy la Grande » Dr Pierre Bertin-Roulleau
  • Wikipédia
  • photos anciennes publications Facebook de Monsieur Alain Morel
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